Éboulement sur la rue Champlain à Québec (1889)

 
La Patrie, 20 septembre 1889

Le 19 septembre 1889 vers 19h30, un énorme amas de terre et de roc de détache du Cap aux Diamants, écrasant dans sa chute sept maisons de la rue Champlain, dans le Cap-Blanc. Près de 50 personnes perdent la vie.

"On avait remarqué depuis longtemps au-dessous de l'extrémité sud de la Terrasse un énorme quartier de roc surplombant l'abîme. C'est ce roc qui s'est détaché soudainement du Cap et les malheureux qui habitaient les maisons sudessous ont été ensevelis vivants au moment où ils étaient inconscients du danger qui les menaçait" (Le Journal de Québec, 20 septembre 1889)

 

Photographe: Fred C. Würtele
Source: BAnQ

 

"Au moment où l'éboulis s'est produit, à 7.15 heures hier soir, la plupart des habitants des maisons démolies étaient à leurs foyers. Quelques-uns qui se trouvaient dehors ont aperçu tout-à-coup quelques fragments de pierre qui roulaient dans le cap, et aussitôt l'avalanche est descendue avec un bruit effrayant, en faisant trembler le sol, et ils n'ont pas eu le temps d'avertir les infortunés qui étaient à l'intérieur et qui ont tous été ensevelis sous les décombres" (Le Canadien, 20 septembre 1889) 

"Les maisons n'offraient plus qu'un amas informe de débris d'où s'échappait de la fumée accusant un commencement d'incendie. Parfois, on entendait des plaintes sortir du fond de ces ruines." (Le Journal de Québec, 20 septembre 1889)

Les victimes sont issues de familles ouvrières d'origine irlandaise: Berrigan, Nolan, Kemp, McBreaty, Leahy, Farrell, Walsh, Bradley, Doyle, Kennedy,  Fitzgerald,  Burke, Allen, Pemberton, Adams, Henry, Lawson, Black, Maybury...

D'autres éboulements avaient déjà eu lieu à proximité: en mai 1841 (32 victimes) et en juillet 1852 (7 victimes).

"Cette malheureuse catastrophe était prévue depuis longtemps, et ce n'est pas sans de justes appréhensions que les habitants de cette localité y demeuraient. De menaçantes fissures se voyaient béantes sur le flanc du cap, et de temps à autres des quartiers de roc roulaient en bas, jetant un émoi passager dans les familles. Les pluies torrentielles de ces jours derniers ont probablement activé la catastrophe" (Le Canadien, 20 septembre 1889)

 

Photographe: Samuel Kennedy
Source: BAnQ

De nombreux soldats et citoyens s'affairent à porter secours aux blessés, et à tenter de secourir les gens qui crient à l'aide sous les décombres.  La tâche est extrêmement difficile. 24 heures après la catastrophe, on entend encore les plaintes de survivants qu'on ne parvient pas à atteindre.

"À 7 1/2 hier soir, on entendait à différents endroits sous les décombres, les cris étouffés de quelques enfants et de quelques hommes. Peut-on se figurer une position plus épouvantable que celle-là! Quoi de plus navrant que de savoir des êtres ensevelis vivants sous des ruines et ayant parfaitement conscience de leur triste état! Peut-on se faire une idée des terribles angoisses des malheureuses victimes qui sont dans cette position. Aussi, c'était à fendre l'âme que d'entendre hier soir, les cris suppliants et les lamentations de ces pauvres malheureux. Et chose lamentable: on entendait parfaitement les cris de détresse de quelques victimes, et l'on ne savait pas où elles étaient. " (Le Canadien, 21 septembre 1889)

Photographe: J.E. Livernois
Source: BAnQ

 "Quel navrant spectacle que celui offert par ces pauvres victimes étendues ça et là dans la salle des quartiers de la police! Les unes ont le crâne fracassé, les autres une jambe, un bras brisé, la figure lacérée, meurtrie, tordue et lisérée de filets de sang; il y en a qui ont les cheveux arrachés, la bouche et les dents défoncées; les les cadavres sont noircis, affreux à voir." (Le Canadien, 21 septembre 1889)

Dans les jours suivants, on se résigne: les personnes qui n'ont pas encore été extirpées des décombres sont certainement décédées.

"Quoi qu'il en soit, les gémissements des victimes, leurs plaintes et leurs appels au secours ont cessé; on n'a rien entendu de la matinée. De sorte qu'il n'existe plus aucun espoir de trouver vivants Nolan et son malheureux voisin." (Le Canadien, 23 septembre 1889)


Endroit où on a retrouvé Joseph Kemp
Photographe: J. Beaudry
Le Monde illustré,  5 octobre 1889

À la surprise générale, Joseph Kemp, 74 ans, est retrouvé vivant le matin du 24 septembre, après avoir passé plus de 4 jours sous les décombres! On l'avait entendu crier à l'aide dans les jours précédents, mais on ne l'avait plus entendu depuis longtemps. Kemp décède toutefois quelques heures après son sauvetage.


La Justice, 24 septembre 1889

La recherche des cadavres durera au total une dizaine de jours. La dernière victime extirpée des décombres est Tom Pemberton. Ne le trouvant pas, on avait même considéré la possibilité qu'il se soit noyé dans le fleuve en tentant d'échapper à l'éboulis.

"Hier l'après-midi, quelques amis s'étant faits déblayeurs ont mis à découvert le cadavre tout déchiqueté et à demi corrompu du jeune Tom Pemberton. Il fut trouvé près de l'endroit où le vieux Kempt l'a été. Une jambe était arrachée et la tête affreusement broyée." 
(...)
"Cela porte à 42 le nombre de cadavres retirés des décombres, et à 45 le nombre total des  morts, en comptant les trois blessés décédés à l'hôpital."  (L'événement , 1er octobre 1889)

Yves Pelletier

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