Les Rolling Stones à Montréal en 1972
Comme nous l'avons fait remarqué récemment, la presse écrite québécoise s'était montrée relativement indifférente aux trois premiers concerts des Rolling Stones à Montréal, en 1966 et 1967.
Au moment de leur quatrième visite à Montréal, le 17 juillet 1972, toutefois, les choses on bien changé. Après avoir enregistré coup sur coup Beggars Banquet, Let It Bleed, Sticky Finger, et Exile on Main Street, les Rolling Stones ne sont plus considérés comme un simple groupe de "musique yé-yé" dont les membres auraient besoin d'une bonne coupe de cheveux.
"Le spectacle des Rolling Stones au Forum de Montréal, le 17 juillet, ce devrait être, en principe, l'événement artistique de l'été, et peut-être même de l'année. Non seulement parce que tous les billets ont été vendus en quatre heures, un mois avant la représentation, et que c'est une chose plutôt rare, mais aussi parce que les Stones ont la réputation de créer un événement partout où ils passent(...)". (La Presse du jeudi 6 juillet 1972)
Faux billets
Le 14 juillet, les journaux annoncent que des milliers de faux billets ont été mis sur le marché pour le spectacle des Rolling Stones à Montréal. Les autorités s'inquiètent: si les détenteurs de faux billets se présentent au spectacle, il y aura beaucoup plus de spectateurs que ce que peut contenir le forum...
La Presse, 14 juillet 1972 |
Attentat à la bombe
Le 17 juillet à 3 heures du matin, une bombe placée sous un des camions de la tournée de Rolling Stones explose, faisant éclater les fenêtres de la façade nord du forum. Heureusement, l'explosion ne fait aucun blessé et les dégâts matériels sont limités. Les raisons de cet attentat sont assez nébuleuses.
Le Droit, 17 juillet 1972 |
"Le concert des Rolling Stones a bel et bien eu lieu, hier soir, au Forum, à la satisfaction des quelque 20 000 jeunes qui avaient réussi à se procurer des billets, mais au grand dam d'environ 4000 autres, fort mécontents, qui ont perpétré de nombreux actes de violence durant plus de trois heures.Le bilan: une trentaine de personnes amenées au poste sous diverses accusations, plusieurs autres blessées par des éclats de verre ou des pierres, deux automobiles de patrouille-radio incendiées et des dizaines de confrontations et d'escarmouche entre les manifestants et quelque 500 policiers, aux abords du Forum." (La Presse du 18 juillet 1972)
Les agitateurs ont peut-être manqué de clarté sur leurs intentions: alors que La Presse et Le Devoir les décrivent comme des fans des Rolling Stones frustrés de ne pas pouvoir assister au spectacle, le journaliste du Montréal-Matin a cru qu'il s'agissait de "manifestants anti-Rolling Stones" qui voulaient empêcher la tenue du spectacle.
"Alors que le spectacle des Rolling Stones se déroulait convenablement à l'intérieur du Forum, hier soir, c'est à l'extérieur que les policiers ont eu de la difficulté avec un groupe imposant de manifestants anti-Rolling Stones. D'aucuns prétendaient qu'ils étaient à peu près trois mille rassemblés dans un parc voisin du Forum.Plus de cinq cents policiers ont dû intervenir quand le groupe tenta de pénétrer dans l'enceinte du Forum avec des "intentions non dissimulées". La charge policière a porté fruit puisqu'on a réussi à maîtriser, non sans peine, le groupe refoulé vers la rue Guy, à l'est du Forum. Pendant l'opération toutefois, les manifestants ont brisé plusieurs fenêtres et montres d'établissements commerciaux, lancé des cocktails Molotov et se sont bagarrés entre eux. La police a procédé à plusieurs arrestations." (Le Montréal-Matin du 18 juillet 1972)
Montréal-Matin du 18 juillet 1972 |
Le spectacle
À leur entrée dans le Forum, les spectateurs se font confisquer les bouteilles d'alcool qu'ils ont en leur possession.
"C'est d'ailleurs avec un large sourire que l'un des policiers affectés à l'opération nous déclarait: "On garde les bouteilles, mais la drogue, on les laisse entrer avec." " (La Presse, 18 juillet 1972)
Le Devoir, 18 juillet 1972 |
Il fait extrêmement chaud à l'intérieur du Forum, où s'entassent 20 000 spectateurs. Stevie Wonders assume la première partie du spectacle. La prestation des Stones eux-même ne dure qu'environ une heure (on mentionne que Mick Jagger parle en français entre les chansons).
"Vêtu de son collant blanc habituel, de son long foulard rouge qui rappelle notre ceinture fléchée, Jagger n'a pas refusé à l'assistance le spectacle spécial qu'elle attendait de lui. Il a navigué entre l'audace et la prudence; les mimiques nerveuses et narcissiques qui ont hissé ce personnage au niveau de mythe, ponctuaient abondamment les chansons. Chaque coup de reins, chaque geste menaçant du doigt, chaque pirouette mi-érotique, mi-poétique, trouvait une réponse dans la mer de corps entassés près de la scène. Du haut de la passerelle, on apercevait les bras élevés qui scandaient le rythme puissant, les filles qui se déhanchaient contre leurs voisins, les visages quasi-transfigurés." Robert-Guy Scully, Le Devoir du 18 juillet 1969.
"Pour ceux que cet aspect des choses intéresse, il faut ajouter qu'à la formation régulière des Stones s'étaient joints un pianiste, un trompettiste et un saxophoniste, tous trois excellents, et dont les instruments ajoutaient une couleur très soutenue aux musiques de Keith Richard.
Les fans de ce dernier seront peut-être déçus d'apprendre qu'il a fort bien joué, mais qu'il n'a interprété qu'une seule chanson, et qu'il fut le reste du temps extrêmement discret. Même chose pour Bill Wyman, le bassiste, qui garde du temps des débuts des Stones un faciès sans expression. Charlie Watts, à la batterie, et Mike Taylor à la guitare, furent exemplaires." (René Homier-Roy, La Presse du 18 juillet 1972)
Le Soleil, 18 juillet 1972 |
- 1965: Rolling Stones visitent Montréal à trois reprises en quelques mois.
- En 1964, les Beatles font deux courtes prestations au Forum de Montréal
- Le festival pop de Manseau déçoit beaucoup (1970)
- Des étudiants attaquent des marathons de danse à St-Laurent et à Hull (1933)
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Yves Pelletier
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