Qu'est-il donc arrivé à Cécile Michaud? (1910)

La Patrie, 24 octobre 1910

Le 23 octobre 1910, des enfants trouvent le cadavre d'une jeune fille sous des buissons, dans un terrain vacant de Westmount. La dépouille est dans un triste état, la majeure partie du corps ayant été réduite à l'état de squelette.  "Le tronc était encore enserré dans un corset, et les pieds enfermés dans des souliers Oxford à talons hauts; ce sont les parties du cadavre qui ont seules échappé à la dent des rats." (La Patrie, 24 octobre 1910). L'état du cadavre ne permet pas de déterminer la cause du décès, on peut seulement affirmer qu'aucun os n'a été fracturé.

Grâce à des vêtements et à quelques effets personnels trouvés à côté du cadavre, la victime est rapidement identifiée: il s'agit de Cécile Michaud, âgée de 13 ans, dont les parents étaient sans nouvelles depuis le 30 août.  

La Presse, 26 octobre 1910

Que s'est-il donc passé entre l'après-midi du 30 août, quand Cécile Michaud a quitté le domicile de ses parents sur la rue Marie-Anne et le 23 octobre, quand son cadavre a été retrouvé à Westmount? Les différents témoignages recueillis lors de l'enquête n'ont permis de reconstituer qu'une partie de l'énigme.

Le 29 août (la veille de sa disparition) Cécile Michaud se trouve en compagnie de sa meilleure amie Bernadette Dagenais. Âgée de 14 ans, Bernadette travaille comme sténo-dactylo dans un bureau d'agents immobiliers. Cécile est légèrement plus jeune (13 ans et demi), mais elle paraît un peu plus vieille que son âge. Elle sont abordées dans le tramway par deux hommes qu'elles ne connaissent pas: Ludger Perrault, hôtelier,  et Albert Chevrier, commis de bar. Chevrier offre aux deux filles une promenade en automobile. Cécile est tentée, mais Bernadette refuse l'invitation, car elle doit rentrer chez elle. La promenade en auto est reportée au lendemain, à la fin de la journée de travail de Bernadette Dagenais.

La Presse, 29 octobre 1910

Le 30 août, Cécile Michaud quitte donc le domicile de ses parents en leur disant qu'elle va rejoindre Bernadette Dagenais. Les deux jeunes filles rencontrent Perrault et Chevrier à l'endroit prévu, en précisant qu'elles devront toutes deux être de retour chez elles à 19 h. Perrault loue une automobile, qui est conduite par Achille Derome. Vers 17h45, les quatre jeunes montent dans la voiture, qui les conduit à l'Hôtel Béliveau, sur le chemin de la Côte Saint-Paul, où Chevrier propose d'aller souper. 

Dans un salon de l'hôtel, Bernadette danse avec Chevrier pendant que Cécile joue du piano. Perrault, de son côté, passe la majeure partie du temps au bar en compagnie de Derome, le chauffeur de l'auto. 

Aux environs de 19 h, Bernadette insiste pour retourner chez elle, tel que convenu. Elle tente de convaincre Cécile de repartir avec elle, mais cette dernière refuse.  Elle s'amuse bien, le souper promis n'a pas encore été commandé, et Chevrier lui donnera un cadeau si elle reste à l'hôtel jusqu'à 21 h.

Chevrier donne 50 cents à un jeune garçon pour qu'il accompagne Bernadette Dagenais à la station de tramway la plus proche, et celle-ci retourne seule chez elle, par ses propres moyens.

À l'hôtel, le souper est servi vers 19h30. Ludger Perrault, qui semble un peu ivre, quitte les lieux vers 20 h en refusant de payer pour le souper, prétextant qu'il n'avait rien commandé.

À partir de 20h30, Albert Chevrier est séquestré dans un bureau de l'hôtel car il n'a pas assez d'argent pour payer. Pendant ce temps, Cécile Michaud attend sur la véranda à l'entrée de l'hôtel. Un long moment est nécessaire pour que les propriétaires de l'hôtel obtiennent l'assurance qu'ils seront payés dans les jours suivant. Lorsque Chevrier sort de l'hôtel, vers 21h30 ou 22 h, il constate que Cécile Michaud n'est plus là. Il retourne donc chez lui en tramway. Le chauffeur Achille Derome serait reparti un peu plus tôt, pendant que Chénier était encore dans l'hôtel. Un témoin pense avoir vu une jeune fille qui marchait en pleurant à proximité de l'hôtel vers 21 h.

Presque deux mois plus tard, le cadavre de Cécile Michaud est retrouvé plusieurs kilomètres plus loin, à Westmount. Certains voisins pensent avoir entendu des cris ou des gémissement à cet endroit dans la nuit du 30 au 31 août, mais on ne sait pas grand chose de plus.

Suite à l'enquête du coroner, Ludger Perrault, Albert Chevrier et Achille Derome ont d'abord été accusés du meurtre de Cécile Michaud, mais ces accusations furent abandonnées, faute de preuve.

La Presse, 19 novembre 1910

Le 11 janvier 1911, Ludger Perrault et Albert Chevrier sont condamnés à 5 mois de prison pour enlèvement de personnes mineures.  Puisque Cécile Michaud et Bernadette Dagenais étaient âgées de moins de 16 ans, leur consentement était insuffisant et l'autorisation des parents était nécessaire. Achille Derome, le conducteur de l'auto, est acquitté des mêmes accusations après avoir passé plusieurs semaines en prison dans l'attente du verdict.

La Presse, 10 janvier 1911

Yves Pelletier


L'arrestation du Dr Crippen (1910)

Le 31 juillet 1910, le docteur Hawley Harvey Crippen et sa compagne Ethel Clara Le Neve sont mis en état d'arrestation alors qu'ils se trouvent à bord du bateau transatlantique Le Montrose, au large de Pointe-au-Père. Accusés d'avoir assassiné l'actrice Belle Elmore, épouse de Crippen, ils sont emprisonnés à Québec en attendant leur extradition à Londres.

La Patrie, 1er août 1910

Les journaux québécois commencent à parler de l'affaire Crippen dès le 14 juillet 1910, le lendemain de la découverte du cadavre partiel de Belle Elmore en Angleterre.

Le Soleil, 16 juillet 1910

Le Dr Crippen,  originaire des États-Unis, vivait en Angleterre depuis quelques années en compagnie de son épouse, une actrice de music hall américaine dont le nom de scène était Belle Elmore.

Au début du mois de février 1910, le Vaudeville Artist Guild reçoit une lettre dans laquelle Belle Elmore les avise qu'elle doit partir d'urgence pour les États-Unis. Dans les semaines suivantes, le peu subtile Dr Crippen assiste à des événements mondains en compagnie de sa jeune et jolie sténographe d'origine française, Ethel Clara Le Neve, qui porte des vêtements et des bijoux appartenant à Belle Elmore. Au mois de juin, un journal anglais publie un entrefilet annonçant le décès de Belle Elmore à Los Angeles.

Belle Elmore
(Source: Wikipedia)

Alertée par des connaissances de Belle Elmore, la police amorce une enquête. Crippen admet avoir inventé le décès de son épouse; il prétend qu'en fait elle s'est enfuie pour rejoindre son amant. Après avoir constaté que Crippen et Le Neve ont pris la fuite, des enquêteurs fouillent la demeure de Crippen et trouvent, dans la cave, des restes humains plongés dans de la chaux vive.

Soupçonnant que Crippen et Le Neve ont pris un bateau vers l'Amérique, Scotland Yard télégraphie une description du couple dans l'espoir qu'il puisse être intercepté à son arrivée au port de New York.

Dr Crippen et Mlle Le Neve
(Le Soleil, 1er août 1910)

Crippen est décrit comme "un docteur américain, âgé de 50 ans, hauteur 5 pieds 3 pouces, complexion claire, cheveux bruns tournant sur le gris, chauve sur le sommet du crâne, moustaches assez longues, marque sur le bas du nez, a de fausses dents et un lorgnon d'or; parle avec un léger accent américain, porte son chapeau en arrière, parle clairement, tranquillement; est accompagné d'une femme se faisant appeler Mme Crippen, âgée de 27 ans, cheveux châtains, yeux gris, belles dents, jolie et d'apparence agréable et de taille moyenne." (Le Soleil, 16 juillet 1910)

La Presse, 25 juillet 1910

Le 25 juillet, les journaux rapportent que la police de Scotland Yard est convaincue que les deux fugitifs se trouvent à bord du Montrose, un bateau à vapeur qui fait route vers Québec après être parti d'Anvers le 20 juillet.  Crippen voyagerait sous l'identité de John Robinson et Mlle Le Neve, déguisée en homme, se ferait passer pour son fils. C'est le capitaine Henry George Kendall du Montrose qui a envoyé un marconigramme aux autorités; apparemment, le déguisement de garçon de Mlle Le Neve est peu convaincant. 

(N.B.: Quatre ans plus tard, le capitaine Kendall survivra au naufrage de l'Empress of Ireland, au large de Pointe au Père, qui fit 1012 victimes).

L'inspecteur Walter Dew de Scotland Yard est parti de Liverpool à bord du Laurentic, plus rapide que le Montrose, dans le but d'arrêter les fugitifs avant leur arrivée à destination.

Le Soleil, 26 juillet 1910

Tel que prévu, le détective Dew arrive à Pointe-au-Père le 30 juillet, où il est accueilli par trois policiers québécois: J. Charles Gauvreau, chef de police de Rimouski, Augustin McCarthy chef de la police provinciale et le détective George Denis de la police provinciale. Une quarantaine de journalistes sont également présents!

Le Soleil, 1er août 1910

Le Montrose arrive le lendemain, le matin du 31 juillet. Il s'immobilise devant Pointe au Père, près de Rimouski, car c'est à cet endroit qu'il doit prendre à son bord un pilote spécialisé dans la navigation sur le Saint-Laurent.
 
On croit que Crippen est armé, et qu'il pourrait se suicider s'il comprend à l'avance qu'il est sur le point d'être mis en état d'arrestation. Pour éviter d'éveiller ses soupçons, les policiers Dew, McCarthy et Denis se rendent au Montrose en utilisant le petit bateau généralement utilisé pour le transport du pilote (ils portent même des vêtements de pilote). Quant aux journalistes, ils sont cantonnés à bord d'un autre bateau, l'Eureka.

Le chef Augustin McCarthy et le détective George Denis
(Le Soleil, 1er août 1910)

Les trois policiers montent à bord du Montrose et n'ont aucune difficulté à arrêter les deux fugitifs, qui prenaient l'air sur le pont. Crippen aurait déclaré à l'inspecteur Dew "Je suis heureux que ce soit fini, car mon anxiété était telle que je ne pouvais plus la supporter". 

Le Montrose poursuit ensuite son voyage vers Québec, où il arrive le 1er août vers 1 heure du matin. Malgré l'heure tardive, 500 curieux sont sur le quai pour le voir arriver. Crippen et Le Neve sont emmenés dans la prison de Québec, où ils demeurent incarcérés pendant environ trois semaines.

Le Soleil, 2 août 1910

Le 20 août, les deux prisonniers sont escortés à bord du Megantic pour leur voyage de retour en Angleterre.

Le 22 octobre, à l'issue d'un procès qui a duré 4 jours et demi, Crippen est trouvé coupable du meurtre de sa femme et est condamné à la pendaison. Il n'a jamais admis sa culpabilité.

La Presse, 21 octobre 1910

Le 25 octobre, Ethel Clara Le Neve est acquittée des accusations de complicité après coup qui avaient été portées contre elle. Son procès a duré moins d'une journée. Apparemment, elle aurait accepté de voyager sous une fausse identité, déguisée en garçon, sans avoir la moindre idée que Crippen avait quelque chose à se reprocher...

La Presse, 25 octobre 1910

Le Dr Crippen est pendu à la prison de Pentonville le matin du 23 novembre 1910.

La Presse, 23 novembre 1910


Yves Pelletier

Le festival pop de Manseau (1970)

Le "Woodstock Pop Festival de Manseau" avait pour objectif de reproduire au Québec un événement musical similaire au festival de Woodstock (qui avait eu lieu l'année précédente). Le résultat a été un flop monumental.

La Tribune, 30 juillet 1970

Au début du mois de juin 1970, les organisateurs avaient d'abord annoncé que ce festival aurait lieu à Saint-Édouard de Maskinongé, mais les autorités avaient jugé que l'endroit n'était pas approprié pour un tel rassemblement (on parlait alors de la possibilité que pas moins de 100 000 hippies participent à l'événement).

À la fin du mois de juin, on annonce que le festival aura plutôt lieu à Manseau , une petite localité d'environ 800 habitants située entre Trois-Rivières et Québec, du 31 juillet au 2 août. Le site choisi est une terre agricole située à proximité de la route transcanadienne; cette fois, le gouvernement juge que l'endroit pourrait raisonnablement accommoder une foule de 50 000 personnes.  Les billets peuvent être achetés à l'avance au prix de $12, où à l'entrée du site pour la somme de $15 (en dollars d'aujourd'hui, ça correspond à un peu plus de $100).

Publicité pour le Festival de Manseau
Montréal-Matin, 9 juillet 1970


Billet pour le Festival de Manseau


Plan du site
(Le Nouvelliste, 24 juillet 1970)

Lors de cette conférence de presse du mois de juin, les organisateurs promettent la présence de grandes vedettes américaines... mais ne précisent pas lesquelles. Dans les semaines qui suivent, la machine à rumeur s'emballe: Jimmy Hendrix, Joe Cocker, Led Zeppelin, Sly and The Family Stone, Little Richard, Canned Heat, Ritchie Havens, The Voices of East Harlem, Paul McCartney, Joan Beaz et d'autres sont tour à tour mentionnés dans les médias. 

Dans les jours qui précèdent le festival, on commence à soupçonner que certaines choses ne tournent pas rond. Les frères Filiatrault, qui travaillent à l'organisation du festival, sont recherchés pour fraude: dans le passé, ils auraient récolté de l'argent pour recruter des artistes qui ne se sont jamais présentés.  Ziggy Wiseman, également impliqué dans l'organisation du festival, figure sur la liste noire de la Guilde des musiciens car il n'a pas respecté ses contrats avec des artistes dans les années précédentes.

Le Nouvelliste, 31 juillet 1970

Lors d'une conférence de presse le 29 juillet (à deux jours du début du festival), Wiseman continue de se montrer évasif sur l'identité des artistes qui se produiront au festival, et il refuse de montrer le moindre contrat aux journalistes présents. 

L'agence de sécurité Alliance, qui devait fournier 150 agents de sécurité pour le festival, annule son contrat car elle n'a pas reçu l'argent qu'on lui avait promis. À la dernière minute, on la remplace par l'agence Citadelle, et le gouvernement accepte d'augmenter le nombre de policiers affectés au festival pour compenser la diminution du nombre d'agents de sécurités.

La Presse, 31 juillet 1970

Le festival de Manseau débute donc le vendredi 31 juillet 1970, avec beaucoup, beaucoup moins de spectateurs que prévu. Les organisateurs avaient prétendu  que 26 000 billets avaient été vendus à l'avance, mais ce nombre sera bientôt révisé à ... 1400.  Le spectacle commence avec 3 heures et demi de retard, et ne présente ce soir là que des groupes totalement inconnus, qui jouent dans l'indifférence générale.

Le Nouvelliste, 1er août 1970

Pendant l'ensemble du festival le seul artiste américain raisonnablement connu est Dr. John, qui se présente sur la scène du festival tard le samedi soir. Le lendemain, les musiciens du groupe déclarent ne pas avoir reçu les $4 500 qu'on leur avait promis...

La Presse, 3 août 1970

Pendant la nuit de vendredi à samedi, l'agence de sécurité Citadelle retire ses gardiens, puisqu'elle n'a pas reçu l'argent promis. De nombreux spectateurs parviennent sans trop de mal à entrer sans payer, malgré la clôture de contreplaqué qui entoure le site. Le samedi en début d'après-midi, on finit par annoncer que l'entrée au festival est désormais gratuite. 

Cette annonce provoque l'arrivée d'un nouveau genre de spectateurs: des centaines de "touristes" curieux de voir de leurs propres yeux des hippies qui se baignent tous nus! Ces nudistes ne sont pas très nombreux, mais tous les journaux ont mentionné leur présence...

"Le trou d'eau brune de la ferme Napoléon, le seul endroit rafraîchissant de tout le site, devint le point de ralliement des curieux, avides de seins nus et de pénis en liberté. Il y eut, à certains moments, des incidents époustouflants: une fille nue qui circulait dans le ruisseau était continuellement suivie sur la berge par une centaine de spectateurs, se déplaçant de gauche à droite selon les caprices de la belle." (La Presse, 3 août 1970)

Le Petit Journal, 9 août 1970

La seule activité qui semble avoir été correctement organisée au festival de Manseau est le commerce de la drogue. Le cannabis et le LSD sont extrêmement facile à obtenir, et les vendeurs ne se font aucunement inquiéter par les policiers. Le service médical présent sur les lieux a dû traiter, selon La Presse, 60 personnes intoxiquées par le LSD et 80 autres par du haschisch. Selon le Nouvelliste, il s'agit plutôt de 600 cas de LSD et 30 de haschisch!

Le Nouvelliste, 3 août 1970

L'événement prend fin tôt le dimanche après-midi, plusieurs heures avant l'heure de clôture qui avait initialement été annoncée.  Le bilan: beaucoup de drogue mais peu de musique! Et très peu de violence, malgré la déception de ceux qui ont payé leur billet dans l'espoir d'assister à de bons spectacles.

Les arrestations ont été plutôt rares. On déplore le viol collectif d'une adolescente de 15 ans, un adolescent surnommé Pompon a été poignardé dans le dos mais a refusé de porter plainte,  et on a dû sauver de la noyade un un jeune qui, sous l'emprise du LSD, désirait nager dans le fleuve jusqu'à Batiscan.

Le Nouvelliste, 3 août 1970


Yves Pelletier

À lire également:

 

Éboulement sur la rue Champlain à Québec (1889)

 
La Patrie, 20 septembre 1889

Le 19 septembre 1889 vers 19h30, un énorme amas de terre et de roc de détache du Cap aux Diamants, écrasant dans sa chute sept maisons de la rue Champlain, dans le Cap-Blanc. Près de 50 personnes perdent la vie.

"On avait remarqué depuis longtemps au-dessous de l'extrémité sud de la Terrasse un énorme quartier de roc surplombant l'abîme. C'est ce roc qui s'est détaché soudainement du Cap et les malheureux qui habitaient les maisons sudessous ont été ensevelis vivants au moment où ils étaient inconscients du danger qui les menaçait" (Le Journal de Québec, 20 septembre 1889)

 

Photographe: Fred C. Würtele
Source: BAnQ

 

"Au moment où l'éboulis s'est produit, à 7.15 heures hier soir, la plupart des habitants des maisons démolies étaient à leurs foyers. Quelques-uns qui se trouvaient dehors ont aperçu tout-à-coup quelques fragments de pierre qui roulaient dans le cap, et aussitôt l'avalanche est descendue avec un bruit effrayant, en faisant trembler le sol, et ils n'ont pas eu le temps d'avertir les infortunés qui étaient à l'intérieur et qui ont tous été ensevelis sous les décombres" (Le Canadien, 20 septembre 1889) 

"Les maisons n'offraient plus qu'un amas informe de débris d'où s'échappait de la fumée accusant un commencement d'incendie. Parfois, on entendait des plaintes sortir du fond de ces ruines." (Le Journal de Québec, 20 septembre 1889)

Les victimes sont issues de familles ouvrières d'origine irlandaise: Berrigan, Nolan, Kemp, McBreaty, Leahy, Farrell, Walsh, Bradley, Doyle, Kennedy,  Fitzgerald,  Burke, Allen, Pemberton, Adams, Henry, Lawson, Black, Maybury...

D'autres éboulements avaient déjà eu lieu à proximité: en mai 1841 (32 victimes) et en juillet 1852 (7 victimes).

"Cette malheureuse catastrophe était prévue depuis longtemps, et ce n'est pas sans de justes appréhensions que les habitants de cette localité y demeuraient. De menaçantes fissures se voyaient béantes sur le flanc du cap, et de temps à autres des quartiers de roc roulaient en bas, jetant un émoi passager dans les familles. Les pluies torrentielles de ces jours derniers ont probablement activé la catastrophe" (Le Canadien, 20 septembre 1889)

 

Photographe: Samuel Kennedy
Source: BAnQ

De nombreux soldats et citoyens s'affairent à porter secours aux blessés, et à tenter de secourir les gens qui crient à l'aide sous les décombres.  La tâche est extrêmement difficile. 24 heures après la catastrophe, on entend encore les plaintes de survivants qu'on ne parvient pas à atteindre.

"À 7 1/2 hier soir, on entendait à différents endroits sous les décombres, les cris étouffés de quelques enfants et de quelques hommes. Peut-on se figurer une position plus épouvantable que celle-là! Quoi de plus navrant que de savoir des êtres ensevelis vivants sous des ruines et ayant parfaitement conscience de leur triste état! Peut-on se faire une idée des terribles angoisses des malheureuses victimes qui sont dans cette position. Aussi, c'était à fendre l'âme que d'entendre hier soir, les cris suppliants et les lamentations de ces pauvres malheureux. Et chose lamentable: on entendait parfaitement les cris de détresse de quelques victimes, et l'on ne savait pas où elles étaient. " (Le Canadien, 21 septembre 1889)

Photographe: J.E. Livernois
Source: BAnQ

 "Quel navrant spectacle que celui offert par ces pauvres victimes étendues ça et là dans la salle des quartiers de la police! Les unes ont le crâne fracassé, les autres une jambe, un bras brisé, la figure lacérée, meurtrie, tordue et lisérée de filets de sang; il y en a qui ont les cheveux arrachés, la bouche et les dents défoncées; les les cadavres sont noircis, affreux à voir." (Le Canadien, 21 septembre 1889)

Dans les jours suivants, on se résigne: les personnes qui n'ont pas encore été extirpées des décombres sont certainement décédées.

"Quoi qu'il en soit, les gémissements des victimes, leurs plaintes et leurs appels au secours ont cessé; on n'a rien entendu de la matinée. De sorte qu'il n'existe plus aucun espoir de trouver vivants Nolan et son malheureux voisin." (Le Canadien, 23 septembre 1889)


Endroit où on a retrouvé Joseph Kemp
Photographe: J. Beaudry
Le Monde illustré,  5 octobre 1889

À la surprise générale, Joseph Kemp, 74 ans, est retrouvé vivant le matin du 24 septembre, après avoir passé plus de 4 jours sous les décombres! On l'avait entendu crier à l'aide dans les jours précédents, mais on ne l'avait plus entendu depuis longtemps. Kemp décède toutefois quelques heures après son sauvetage.


La Justice, 24 septembre 1889

La recherche des cadavres durera au total une dizaine de jours. La dernière victime extirpée des décombres est Tom Pemberton. Ne le trouvant pas, on avait même considéré la possibilité qu'il se soit noyé dans le fleuve en tentant d'échapper à l'éboulis.

"Hier l'après-midi, quelques amis s'étant faits déblayeurs ont mis à découvert le cadavre tout déchiqueté et à demi corrompu du jeune Tom Pemberton. Il fut trouvé près de l'endroit où le vieux Kempt l'a été. Une jambe était arrachée et la tête affreusement broyée." 
(...)
"Cela porte à 42 le nombre de cadavres retirés des décombres, et à 45 le nombre total des  morts, en comptant les trois blessés décédés à l'hôpital."  (L'événement , 1er octobre 1889)

Yves Pelletier

Décès du lutteur Stanley Stasiak (1931)

Le 13 septembre 1931, le lutteur Stanley Stasiak meurt des suite d'une blessure subie lors d'un combat quelques jours auparavant.

Stanley Stasiak
(La Presse, 31 août 1929)

La lutte à Montréal, en 1931, c'est du sérieux: chaque lundi soir, du mois de mai jusqu'au mois d'octobre, au moins 5 000 spectateurs se rassemblent à l'aréna Mont-Royal pour assister à des combats endiablés. Le mardi, tous les journaux (y compris le très sérieux Devoir!) publient une description détaillée des confrontations de la veille. Quelques mois auparavant, le promoteur Lucien Riopel a  même commencé à présenter des combats au Théâtre Saint-Denis pendant l'hiver, lorsque l'aréna Mont-Royal est strictement réservée à la présentation de matches de hockey.

Stanley Stasiak
(Le Soleil, 2 septembre 1930)

Natif de Pologne mais résidant à Cambridge, au Massachusetts, Stasiak lutte depuis plusieurs années lorsqu'il fait ses débuts à Montréal, le 15 juillet 1929, remplaçant au pied levé le lutteur Eugène Ledoux.

"Faisant ses débuts à Montréal, Stasiak s'est attiré les huées de la foule ainsi que des journaux et même une bouteille en maltraitant son adversaire, Glavio Massimo, qui pesait seulement 196 livres, soit 44 livres de moins que le géant polonais. Stasiak s'est montré brutal à l'extrême, frappant durement sont plus léger adversaire. Massimo s'est vaillamment dépensé pour tenir tête à Stasiak, mais il n'était ni assez lourd, ni assez fort et ni assez résistant pour faire la lutte au géant polonais, qui est pratiquement aussi grand que Jim Maloney et beaucoup plus gros. Au cours de sa courte lutte, le Polonais a montré qu'il est doué d'une force peu commune et il serait intéressant de la voir de nouveau à l'oeuvre mais contre un adversaire qui pourrait lui donner du fil à retordre" (La Presse, 16 juillet 1929)

Stanley Stasiak
(La Presse 11 septembre 1931)

Les commentateurs sont unanimes: Stasiak est costaud (240 livres) et très agressif: les spectateurs le détestent!

"Avant de remporter la victoire, Stasiak a encore fait des siennes, tirant les cheveux et les oreilles de son adversaire, le frappant avec ses poings comme avec ses pieds, allant même jusqu'à tenter de l'étrangler en lui serrant fortement la gorge entre ses deux mains." (La Presse, 23 juillet 1929).

Pendant les trois années suivantes, Stasiak participe à 28 soirées de lutte à Montréal, combattant tour à tour Clavio Massimo, Jimmy Maloney, Wladeck Zbysko, Henri Deglane, Einar Johannsen, Gus Sonnenberg, Strangler Lewis, Regis Siki, Carl Vogel, George Varsell, Dan Petroff, Jack Ganson, Pat McGill, Nick Lutze, Charlie Stack et Raoul Simon.

De gauche à droite: Strangler Lewis, l'arbitre Eugène Tremblay et Stanley Stasiak
(La Presse, 8 avril 1930)

Il participe également à 9 soirées de lutte à l'Aréna de Québec, organisées par le promoteur Joseph Asselin, et à 6 soirées de lutte à l'Auditorium du centre communautaire d'Ottawa, organisées par le promoteur Ted Wright. Le 17 juillet 1931, à Ottawa, il lutte dans deux combats le même soir (contre Karil Popeshil et Fred Myers) pour compenser l'absence imprévue de George Vassel, qu'il était supposé affronter.

Le Droit, 13 mai 1931

Le 3 septembre 1931, Stasiak affronte Ed Don George au à l'Arena Gardens de Toronto, devant 7500 spectateurs. Pendant ce combat, Stasiak est blessé au coude. Mais les blessures font partie du métier et Stasiak n'y accorde pas d'attention particulière. Dans les jours suivants, Stasiak prend la route en direction du Québec, puisqu'il a des engagements à Montréal et à Québec.

Une intense douleur au bras l'oblige toutefois à s'arrêter d'urgence à Belleville, en Ontario. On diagnostique alors une fracture au bras et une grave infection. Stasiak subit deux opérations, et meurt après quelques jours d'agonie.

La Presse, 14 septembre 1931

"Et nous devons dire que Stanley Stasiak était, dans la vie privée, l'homme le plus aimable qu'il soit possible de rencontrer. Celui qui ne pouvais souffrir la moindre taloche dans l'arène sans employer immédiatement les poings ou le "rabbit punch" était aussi doux qu'un agneau quand il n'était pas en devoir" (L'Action Catholique, 14 septembre 1931).

Stanley Stasiak devait combattre George Vassell à Montréal le 14 septembre, et Jim Maloney à Québec le 16 septembre. Dans les deux cas, les spectateurs observèrent une minute de silence en sa mémoire.

Yves Pelletier


Le dirigeable R-100 au Québec (1930)

Durant l'été 1930, le plus grand dirigeable du monde passe deux semaines au Canada, après avoir traversé l'océan Atlantique.

Le dirigeable R-100 amarré à son mât d'ancrage à l'aérodrome de St-Hubert
La Presse, 16 août 1930

Conférence impériale de 1926

Le 29 octobre 1926, lors de la conférence impériale réunissant les chefs de gouvernement des colonies et dominions de l'Empire britannique, le ministre de l'aviation britannique avait présenté un ambitieux projet de service aérien par dirigeable. En partant de Londres, ce service aurait permis d'atteindre le Canada en deux jours et demi, les Indes en cinq jours et la Nouvelle-Zélande en treize jours. Deux immenses dirigeables étaient déjà en construction en Grande-Bretagne (le R-100 et le R-101), et le premier ministre canadien Mackenzie King s'était alors engagé à ériger un mât d'ancrage en territoire canadien.

Le Devoir, 18 novembre 1926

Construction d'un mât d'ancrage à Saint-Hubert

Le mât d'ancrage est construit en 1928 à l'aérodrome de Saint-Hubert par le montréalais J.A. Adam.

Construction du mât d'ancrage à Saint-Hubert
 (La Presse, 26 juillet 1928) 

Haut de 206 pieds (63 mètres), il s'agit d'un des mâts d'ancrage les plus modernes du monde. Il est muni d'un ascenseur et est beaucoup plus haut que les mâts américains. Le nez du dirigeable s'insère dans une cavité située au sommet du mât; cette partie est libre de tourner.

Le mât d'ancrage à Saint-Hubert
(La Patrie, 30 juillet 1930)

Départ de Cardington

Le R-100 part de Cardington le 29 juillet 1930 à 3h45 avec 44 passagers à bord.

"Le départ s'effectua sans aucune difficulté. Le puissant moteur Rolls-Royce commença à ronfler un peu après 3 heures a.m. et le vrombissement s'accentua davantage, à mesure que le moment du départ approchait. Alors, la foule fit entendre des acclamations frénétiques, des cris de joie, des hourrahs. Les cordes d'amarrage furent levées et le gigantesque vaisseau aérien s'éleva rapidement pour se diriger vers Liverpool." (La Patrie, 29 juillet 1930)

D'autres dirigeables ont déjà traversé l'Atlantique dans les années précédentes: le R-34, le ZR-3 et le Graf Zeppelin, mais ils sont allés aux États-Unis et non au Canada. Avec sa longueur de 219 mètres et son diamètre de 41 mètres, le R-100 est beaucoup plus gros que ses prédécesseurs. Il pourrait transporter une centaine de personnes à la fois. 

Quant aux avions, les traversées de l'Atlantique sont encore hasardeuses et ne permettent de transporter que quelques personnes à la fois: le vol en solitaire de Charles Lindbergh de New York à Paris n'a eu lieu que 3 ans auparavant. En 1928, le Bremen a traversé l'Atlantique de l'Europe vers l'Amérique en atterrissant d'urgence sur une île isolée, mais bien d'autres tentatives ont tragiquement échoué.

Le long du fleuve Saint-Laurent

La traversée de l'océan par le R-100 s'effectue sans incident. Le 31 juillet, le dirigeable longe le fleuve Saint-Laurent: les résidents de Sainte-Anne-des Monts l'observent à 11h15, ceux de Matane à 11h50, ceux de Pointe-au-Père à 13h et deux de Rivière-du-Loup à 13h55. À ce rythme, on prévoit qu'il atteindra Montréal en début de soirée.


Le Soleil, 31 juillet 1930


La Presse, 31 juillet 1930

La suite du voyage, toutefois, n'est pas de tout repos: une forte bourrasque fait soudainement monter le dirigeable de 2 500 pieds (750 mètres), et cause une large déchirure dans la toile d'un de ses ailerons. En s'accrochant à la structure métallique, des membres de l'équipage réparent temporairement l'aileron avec une toile de rechange. Le dirigeable est alors au-dessus de l'Île d'Orléans mais, puisqu'on a coupé les moteurs pour faciliter la réparation, le vent fait reculer le dirigeable de plusieurs kilomètres. 

À Québec, les milliers de spectateurs rassemblés sur les berges du Saint-Laurent ne comprennent pas très bien ce qui arrive: entre 16h00 et 18h00, le dirigeable est parfois visible au loin, avant de disparaître derrière les collines, mais il ne semble pas pressé d'arriver!

La réparation de l'aileron est finalement complétée vers 18h00. Les moteurs sont remis en marche et le R-100 survole Québec vers 19h00.

Le R-100 au-dessus de la ville de Québec
(Carte Postale)

Le R-100 survole le pont de Québec
Source: BAnQ, Fond Action Catholique

Vers 21h30, aux environs de Trois-Rivières, un violent orage cause de nouveaux retards dans la progression du dirigeable.

Pendant ce temps, des milliers de personnes l'attendent à l'aérodrome de Saint-Hubert, où on avait espéré son arrivée en début de soirée. À 23h30, lorsqu'on confirme à la radio que le R-100 ne pourra s'ancrer à son mât que le lendemain matin, des milliers de personnes déçues retournent à Montréal, créant un embouteillage monstre. D'autres choisissent de passer la nuit à l'aérodrome, pour être certains de ne rien manquer.

Le R-100 atteint finalement Montréal le 1er août vers 2h30 du matin. Vers 3h00, il survole une première fois la foule qui l'a attendu toute la nuit à l'aérodrome de Saint-Hubert. Il survole un certain temps la région montréalaise en attendant le lever du jour. 

Le processus d'ancrage au mât de l'aérodrome débute vers 5h00 et est complété à 5h35. Le plus grand paquebot aérien au monde est arrivé à bon port, après 79 heures de vol.

La Patrie, 1er août 1930

Lorsque les membres de l'équipage sortent du dirigeable, leur premier geste consiste souvent à allumer une cigarette, puisque fumer est interdit à l'intérieur du dirigeable. Quelques journaux mentionnent spécifiquement le commandant Colmore, habitué de fumer 50 cigarettes par jour, qui a été forcé de s'en abstenir pendant plus de 3 jours.

Publicité de cigarettes Winchester (La Patrie, 2 août 1930)
et de fromage Kraft (La Presse, 31 juillet 1930)
s'associant à la visite du R-100

Quelques jours sont nécessaires pour compléter la réparation de l'aileron déchiré. Pendant ce temps, le dirigeable demeure amarré à son mât d'ancrage, ce qui laisse à la population montréalaise tout le temps nécessaire pour l'admirer. Dans la seule journée du dimanche 3 août, on estime que 300 000 personnes sont allés voir le dirigeable.  Plus de 30 000 personnes ont emprunté les trains du Canadien National qui font la navette entre Montréal et Saint-Hubert, et 40 000 à 60 000 automobiles ont accédé au site. L'accès à l'aéroport est gratuit pour le public, mais on doit parfois en interdire l'accès parce qu'il est rempli à pleine capacité.


Quelques centaines de dignitaires et de journalistes ont le privilège de monter à bord. 

"Une particularité de la visite du dirigeable R-100, pour éviter certains dangers d'ignition par suite de la présence de certains acides, de certains gaz, que toutes les personnes qui sont admises à pénétrer à l'intérieur du dirigeable doivent, au pied de la tour d'ancrage, se débarrasser de leurs chaussures ordinaires et revêtir des souliers spéciaux à semelle de caoutchouc." (La Presse, 4 août 1930)

Voyage en Ontario

Le dimanche 10 août vers 18h15, devant une foule enthousiaste, le R-100 quitte son mât d'ancrage de Saint-Hubert pour une envolée de 24 heures au-dessus de l'Ontario. La population d'Ottawa et de Hull a l'occasion d'admirer le R-100 en vol pendant environ une heure, entre 22h00 et 23h00.

Le Droit, 11 août 1930

Le lendemain matin (le 11 août), le R-100 survole Toronto et Niagara Falls à plusieurs reprises entre  5 heures et 9h20, traversant ensuite le lac Ontario pour retourner à Montréal.

Retour à Montréal

Le dirigeable survole le centre-ville de Montréal beaucoup plus tôt que prévu, le 11 août vers 16h00; il survole longtemps Montréal et sa banlieue en attendant le moment propice pour retourner au mât d'ancrage, à 19h45.

Le R-100 au-dessus de Montréal
(carte postale)

Le R-100 au-dessus du Pont Jacques Cartier
(carte postale)

Le R-100 repart en direction de l'Angleterre le 13 août à 21h30, avec des vents favorables qui lui permettent d'aller beaucoup plus rapidement qu'à l'allée. Il survole la ville de Québec à 23h50, mais les observateurs ne voient ses lumières que pendant quelques minutes.  Il est de retour à Cardington, en Angleterre, le 16 août 1930 à midi, après une traversée de 57 heures.¸

Écrasement du R-101

Cette première traversée transatlantique du R-100 est une réussite, et on discute déjà de la prochaine traversée et de la pertinence d'ériger un deuxième mât d'ancrage dans les provinces maritimes. L'histoire en décidera toutefois autrement. Le 5 octobre 1930, le R-101, frère jumeau du R-100, part de Londres en direction de l'Inde, mais il s'écrase en France 7 heures plus tard. 48 personnes sont tuées (huit de ces victimes avaient fait la traversée transatlantique à bord du R-100 quelques mois plus tôt). Le programme de dirigeables britanniques est abandonné. Le R-100 fut démonté en décembre 1931 sans avoir fait d'autres vols que son historique traversée transatlantique.


Épilogue: le Hindenburg au Québec

Le R-100 ne sera toutefois pas le seul dirigeable à avoir survolé le territoire québécois: le 1er juillet 1936, sans s'être annoncé, le dirigeable allemand Hindenburg qui se dirige vers Lakehurst, au New Jersey, longe le fleuve Saint-Laurent pour profiter de vents favorables. Il survole ainsi la ville de Québec à 20h07, Trois-Rivières à 21h08 et Montréal à 22h10. 

Le Hindenburg allait prendre feu quelques mois plus tard, le 6 mai 1937, faisant 35 victimes, ce qui mettra fin de façon définitive à tous les projets de transport par dirigeable.

Le Soleil, 2 juillet 1936


Le Hindenburg survolant la ville de Québec (BAnQ)

Destruction du mât de Saint-Hubert

Le mât d'ancrage de l'aérodrome de Saint-Hubert est dynamité le 13 janvier 1938 car, en plus d'être devenu inutile suite à l'abandon du projet de service aérien par dirigeable, il constitue un risque pour les avions qui atterrissent ou décollent de l'aérodrome. En un peu moins de 10 ans d'existence, il n'aura donc servi qu'à une seule occasion, pendant deux semaines, lors de la visite du R-100 au Canada.

Le Bien Public, 20 janvier 1938

L'Illustration Nouvelle, 14 janvier 1938

La Presse, 14 janvier 1938

Yves Pelletier